Dans Bad News from the Stars1, se juxtaposent
les images captivantes de la
Constellation des Voiles, symbole cosmique
des forces qui régissent toute forme
d’interaction physique, et un ensemble
de figures féminines. L’artiste y convoque
pêle-mêle princesse mythologique bafouée,
héroine shakespearienne, déesse
féministe en costume, midinettes manipulatrices
et puériles.
Les vaches dans un paysage bucolique
nous rappellent le mythe fondateur d’Europe,
enlevée sur le rivage de Tyr et violée
par Zeus en Crète. On peut y lire non
pas la plaisante histoire d’amour largement
illustrée dans l’histoire de l’art mais
la grande révolution historique de l’âge
du bronze, où l’humanité, passée d’une
culture du féminin sacralisé à la culture du
féminin déchu, a vu naître l’avènement des
sociétés patriarcales.
«Sur l’onde calme et noire où dorment
les étoiles2» le visage spectral
d’Ophélie, submergée de désespoir,
apparaît extatique. L’image de la mort
est ici accolée à la volupté, le regard
trouble, étant également celui de celle
qui s’abandonne à la «petite mort3».
Lynda Carter, ambassadrice amazone
sculpturale, incarne une figure féminine
résolument bienveillante, qui n’use
de ses pouvoirs et de ses improbables
accessoires que pour soumettre ses
ennemis par l’amour. Elle trône à cet
égard au-dessus de toutes les autres.
Autres héroïnes de série culte, Audrey
Horne et Donna Hayward sont réunies
dans une composition qui met en exergue
leur ressemblance et la thématique du
trouble dissociatif de l’identité, récurrents
chez Lynch. Les deux brunes de
Twin Peaks se chuchotent des secrets à
l’oreille. Il s’agit de la scène mythique dans
le RR Dinner, juste avant qu’Audrey ne se
lève pour danser sur la musique d’Angelo
Badalamenti, révèlant l’adolescente en
femme fatale.
Dans la dernière image, issue de Lost
Highway, les forces nocturnes et féminines
invitent à se perdre sur la route, à lâcher
prise et à se soumettre une fois pour toute
aux forces fondamentales de l’attraction,
quitte à consentir à l’abîme.
Candice Pétrillo